Albert CAMUS (1913-1960), Prix Nobel de Littérature en 1957, fut écrivain, philosophe, romancier, dramaturge, essayiste et fut aussi, comme on le sait, un journaliste militant engagé dans la Résistance française et dans les combats moraux de l'après guerre.
Camus développe dans son oeuvre un humanisme fondé sur la prise de conscience de l'absurdité de la condition humaine mais aussi de la révolte comme réponse à cette absurdité, révolte qui conduit à l'action et "donne un sens au monde et à l'existence".
Son oeuvre (théâtre, romans, nouvelles, essais) , exceptionnelle à plus d'un titre, comprend les ouvrages bien connus : Caligula, Le Mythe de Sisyphe, L'Etranger, La Peste, L'Etat de Siège, Les Justes, L'Homme Révolté, La Chute...
Mais il est un Camus qui est peut-être moins connu et c'est le Camus hors du temps, de la politique, un Camus sensuel, qui nous fait plonger dans ce qui fait l'âme de la terre, du soleil, de la mer, dans ce qui fait, finalement l'âme de l'homme. C'est le Camus que nous découvrons dans "Noces à Tipasa", écrit en 1939, un texte absolument magnifique!
"Au printemps, Tipasa est habité par les dieux et les dieux parlent dans le soleil et l'odeur des absinthes, la mer cuirassée d'argent, le ciel bleu écru, les ruines couvertes de fleurs et la lumière à gros bouillons dans les amas de pierres. A certaines heures, la campagne est noire de soleil. Les yeux tentent vainement de saisir autre chose que des gouttes de lumière et de couleurs qui tremblent au bord des cils..." (Noces, Folio, p 11)
"Ici même, je sais que jamais je ne m'approcherai assez du monde. Il me faut être nu et puis plonger dans la mer, encore tout parfumé de essences de la terre, laver celles-ci dans celle-là, et nouer sur ma peau l'étreinte pour laquelle soupirent lèvres à lèvres depuis si longtemps la terre et la mer. Entré dans l'eau, c'est le saisissement, la montée d'une glu froide et opaque, puis le plongeon dans le bourdonnement des oreilles, le nez coulant et la bouche amère - la nage, les bras vernis d'eau sortis de la mer pour se dorer dans le soleil et rabattus dans une torsion de tous les muscles; la course de l'eau sur mon corps, cette possession tumultueuse de l'onde par mes jambes - et l'absence d'horizon. Sur le rivage, c'est la chute sur le sable, abandonné au monde, rentré dans ma pesanteur de chair et d'os, abruti de soleil, avec, de loin en loin, un regard pour mes bras où les flaques de peau sèche découvrent, avec le glissement de l'eau, le duvet blond et la poussière de sel.
Je comprends ici ce qu'on appelle gloire : le droit d'aimer sans mesure. Il n'y a qu'un seul amour dans ce monde. Étreindre un corps de femme, c'est aussi retenir contre soi cette joie étrange qui descend du ciel vers la mer..." (Noces, Folio, pp 15-16)
Voir ici l'article de JCMemo sur "Noces".
Je découvre donc tardivement ton blog littéraire : je fais mention de ton article dans mon billet...
RépondreSupprimerAmitiés.