mercredi 13 mai 2020

Arthur Schopenhauer : le dilemme du porc-épic (ou du hérisson)



Il s'agit là d'une analogie sur l'intimité humaine, qui nous est proposée par le philosophe allemand Arthur Schopenhauer : ici.

Arthur Schopenhauer
1788-1860 (à 72 ans)
Cette belle analogie est d'actualité en ce temps de passage du confinement au déconfinement.

En effet, quelle saine distance adopter avec les autres : distanciation sociale ou distanciation physique ?



Se rapprocher de nos frères humains tout en gardant nos distances : quel paradoxe inédit!

Prenons exemple sur les porc-épics, ou si l'on veut, les hérissons, et leur dilemme, nous dit Arthur Schopenhauer dans sa Parabole issue de Parerga et Paralipomena : voir ici.


Un groupe de hérissons cherchent à se rapprocher pour partager leur chaleur par temps froid.

Cependant, ils doivent rester éloignés les uns des autres, car ils se blesseraient mutuellement avec leurs épines.

Bien qu'ils partagent tous l'intention de se rapprocher, cela ne peut se produire pour des raisons qu'ils ne peuvent éviter.


Conclusion : malgré la bonne volonté, l'intimité dans les relations sociales usuelles ne peut exister sans préjudices mutuels importants, et, nous le constatons en ce moment, il en résulte un comportement méfiant et des relations forcément distantes...

Voici donc le "Dilemme du porc-épic, ou du hérisson": ici.

« Par une froide journée d'hiver un troupeau de porcs-épics s'était mis en groupe serré pour se garantir mutuellement contre la gelée par leur propre chaleur. Mais tout aussitôt ils ressentirent les atteintes de leurs piquants, ce qui les fit s’écarter les uns des autres. Quand le besoin de se réchauffer les eut rapprochés de nouveau, le même inconvénient se renouvela, de sorte qu'ils étaient ballottés de çà et de là entre les deux maux jusqu'à ce qu'ils eussent fini par trouver une distance moyenne qui leur rendît la situation supportable. 

Ainsi, le besoin de société, né du vide et de la monotonie de leur vie intérieure, pousse les hommes les uns vers les autres ; mais leurs nombreuses manières d'être antipathiques et leurs insupportables défauts les dispersent de nouveau. La distance moyenne qu'ils finissent par découvrir et à laquelle la vie en commun devient possible, c'est la politesse et les belles manières. 

En Angleterre on crie à celui qui ne se tient pas à cette distance : Keep your distance ! Par ce moyen le besoin de se réchauffer n'est, à la vérité, satisfait qu'à moitié, mais, en revanche, on ne ressent pas la blessure des piquants. Cependant celui qui possède assez de chaleur intérieure propre préfère rester en dehors de la société pour ne pas éprouver de désagréments, ni en causer. »

Il y a là de quoi méditer, en effet!
Keep your distance!



samedi 2 mai 2020

Jim Harrison : il était une fois dans l'Ouest


Il était une fois dans l'Ouest : Jim Harrison, le grand écrivain américain, disparu en 2016, me remue toujours autant. Voir ici.


Né au Michigan, il partageait son temps entre l'Arizona et le Montana, deux états américains qui m'ont profondément marqués.

C'était un homme d'un autre temps, un homme sans âge, et pourtant extraordinairement présent.

Voir ici la belle note écrite par notre ami blogueur Jcmemo à propos de son ouvrage Dalva.

Cette note me donne l'occasion de relire des interviews de Jim Harrison publiés en 2016 dans le bel ouvrage intitulé "Amérique des Ecrivains en Liberté" par Jean-Luc Bertini et Alexandre Thiltges (Albin Michel)


Voir ici ma note écrite au moment de la disparition de "Big Jim".

Quelques unes de ses citations, mieux que des commentaires!

"Il faut donner une voix aux gens qui n'en ont pas.
Je crois que telle est la responsabilité de l'écrivain."

"Les oiseaux, un bon repas, une bonne bouteille, et aussi les rivières.

Quand je broie du noir, je remonte ce cours d'eau qui se trouve derrière la maison.
Je parcours ainsi parfois des kilomètres et des kilomètres, et ça me redonne mystérieusement le goût de vivre."


"Mon humeur peut changer très rapidement.
C'est pour ça que je passe tellement de temps dans la nature, ou sur l'eau, car c'est la seule chose qui me permette de recoller les morceaux."

"Il n'y a pas de vérité, que des histoires."

"Oublier le moi, c'est devenir dix-mille autres choses."

"Les écrivains se construisent un masque pour se protéger de leur vulnérabilité, mais s'ils ne sont pas vulnérables, ils ne peuvent pas écrire.

Qu'est-ce qu'un homme sans vulnérabilité pourrait bien écrire? Sur lui-même ?
C'est comme ça qu'Hemingway s'est fait piéger : il a créé une superbe mine, mais il en avait déjà extrait tout l'or!"

"Si l'on passe suffisamment de temps dans la nature, au bout d'un moment, il n'y a plus de dedans ni de dehors.

En d'autres termes, on ne regarde plus la nature de l'extérieur, mais de l'intérieur."

"Le voyage sans destination particulière est mon mécanisme de survie."



Voir ici la liste des livres de Jim Harrison.