Les Solitaires intempestifs |
Lenz de Georg Büchner, publié en 1839, deux ans après la mort de son auteur, à 24 ans, reconstitue sous forme de fiction trois semaines de l'existence du poète Jakob Michaël Reinhold Lenz, figure importante du mouvement Sturm und Drang (Mouvement politique et littéraire allemand de la fin du XVIII°, radicalisation des Lumières et précurseur du Romantisme)
Georg Büchner 1813-1837 |
Jakob Lenz 1751-1792 |
Nous assistons dans ce texte, au basculement du poète dans la folie entre le 20 janvier 1778, date d'arrivée de Lenz, après une traversée de la forêt vosgienne, dans le village de Waldersbach, à la rencontre du Pasteur Oberlin, et le 8 février suivant, date du renvoi de Lenz sous bonne escorte à Strasbourg.
Voir ici la biographie du Pasteur Oberlin, figure bien connue en Alsace.
Le Pasteur Jean-Frederic Oberlin 1740-1826 |
Büchner décrit de façon assez extraordinaire le paysage mental de Lenz au cours de cette crise où il espère trouver un secours auprès du Pasteur Oberlin, mais la religion ne lui est d'aucun secours pour se sauver des forces qui font vaciller son identité : rien ne le protège ni de la perte ni de la déchirure du monde dont il se plaint...
Büchner s'est inspiré des notes laissées par le Pasteur sur cet épisode, et grâce à son style simple, de poésie brute et condensée, il raconte les vacillements de l'âme d'un jeune homme que son hypersensibilité au monde qui l'entoure mène à sa perte.
Voir ici une analyse exhaustive de "Lenz" par Lucile Charliac dans "Savoir et Clinique" 2012/1 (N°15)
Lenz est un chef-d'oeuvre de la littérature, maintes fois traduit, commenté, mis en musique.
C'est une invitation à un voyage intérieur où se mêlent poésie et folie.
Ce texte a été produit et joué au Théâtre du Peuple, à Bussang, dans les Vosges, par Simon Delétang, et également à la Comédie de l'Est, à Colmar (19 et 20 novembre 2018) : saisissant et magnifique!
Le Théâtre du Peuple à Bussang |
"...Mais la nuit passée lui avait laissé une impression terrible. Le monde s'était révélé à lui et il n'était que mouvement et chaos vers un abîme où l'attirait une violence impitoyable.
Il fouillait à présent en lui-même. Il mangeait peu ; moitiés de nuits passées en prière et rêves fiévreux.
Une poussée violente, et puis épuisé, abattu ; il gisait dans les larmes brûlantes et puis soudain il sentait une force, et il se relevait froid et indifférent ; il avait l'impression que ses larmes s'étaient changées en glace, il en riait..."
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