"C'est une absolue perfection, et comme divine de savoir jouir loyalement de son être." Montaigne
jeudi 15 janvier 2015
Antonin Artaud : lettres à Anie Besnard
Antonin Artaud (1896-1948) est un théoricien du théâtre, un acteur, un écrivain, dessinateur, essayiste et poète français.
Inventeur du concept de "théâtre de la cruauté", dans "Le Théâtre et son double", Artaud aura tenté de transformer de fond en comble la littérature, le théâtre, le cinéma.
Chacune de ses activités a été pour lui "un moyen pour atteindre un peu de la réalité qui le fuit".
Constamment sous médicaments, il tentera de lutter contre la douleur qui le taraude en permanence.
Il sera interné en asile pendant près de neuf ans où il subira des séries d'électrochocs.
Ce génie torturé, hypnotisé par sa propre misère, où il a vu celle de l'humanité entière, a rejeté avec violence les refuges de la foi et de l'art.
Il a voulu incarner ce mal, en vivre la totale passion, pour trouver, au coeur du néant, l'extase...
Je voudrais signaler ici les peu connues "Lettres à Anie Besnard" publiées en 1977 par "Le Nouveau Commerce", en supplément au numéro 38 de cette Revue.
La revue "Le Nouveau Commerce", fondée en 1963 par André Dalmas et Marcelle Fonfreide, sous la forme de cahiers de textes, proposait la découverte d'écrivains, de philosophes et de poètes, tout en incitant à la relecture d'oeuvres oubliées.
Le fonds de ces éditions a été repris en 1998 par les Editions José Corti.
Anie Besnard est âgée de quinze ans quand Antonin Artaud lui parle pour la première fois.
De l'écrivain à la jeune fille, puis à la femme s'établira une relation privilégiée.
Au regard mystique du poète, Anie Besnard répond par une attitude naturelle et émerveillée.
Ils ont vécu ensemble, se sont écrits beaucoup de lettres que le temps a dispersées.
Il reste aujourd'hui 24 lettres manuscrites terribles et poignantes adressées par Antonin Artaud entre octobre 1944 et Août 1946, en particulier lors de son internement.
Elles témoignent par ce qu'elles portent en elles d'absolu, de vérité et de tendresse, de ce que fut Antonin Artaud...
Elles témoignent du vouloir du coeur contre les forces mortifères d'oublis et de compromissions...
Lettres écrite au cours de l'année 1946 :
"Jeudi soir.
Chère Anie, chaque fois que je vous vois c'est la plus belle journée de ma vie. -
J'ai l'impression, moi si fatigué, d'avoir près de moi un grand jardin de fleurs qui parle et repose mon coeur mais j'ai eu peur de vous fatiguer car je suis moi un volcan en éruption
Pourtant je voudrais moi aussi tellement me reposer et donner le repos à votre âme mais Anie je ne peux pas me reposer tant que ceux qui n'ont jamais voulu de moi n'auront pas été éliminés
Nous aurons peut-être encore des heures amères mais si votre amour ne me quitte plus cela n'aura pas d'importance
Je sais comme vous avez besoin vous aussi après avoir tant souffert de sécurité enfin et de bonheur
Je vous embrasse du fond du coeur."
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Bon, pour être honnête je ne connais Artaud que de nom et de réputation...
RépondreSupprimerIl est vrai que je ne lis pratiquement que des romans (voire des polars).
Il est vrai que la lettre que tu publies est belle...
Amitiés
Merci pour ta visite!
RépondreSupprimerAntonin Artaud était un être écorché vif et torturé ; dans ses souffrances terribles, de courts moments de lucidité et de pacification...
Amitié